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« Toi et ta cousine, vous êtes donc deux démons chargés de me faire mourir de frayeur, s’écria-t-il en tremblant. Hier c’était elle ; aujourd’hui c’est toi. »

La frayeur de la mère Sanscœur rendit un peu de courage à Esbrouffe. Se levant lentement de dessus sa chaise, il marcha vers son ennemie, qui semblait pétrifiée, et, lui saisissant les mains, il la tira vers la porte, qu’il ouvrit, et la mit dehors. La mère Sanscœur ne résista pas, elle n’était pas revenue de son étonnement quand elle rentra chez elle. Lamalice, pâle, tremblante, se précipita au-devant d’elle et, lui saisissant les mains, ne vit pas son dé ; elle s’écria avec angoisse :

« Mon dé, mon dé ! qu’avez-vous fait de mon dé ?

— Est-ce que je sais, moi ? Il est tombé et resté chez Esbrouffe, où me suis trouvée transportée je ne sais comment et par qui.

— Ah ! cousine, qu’avez-vous fait ? Sans mon dé, nous sommes perdues ; Esbrouffe nous tient en son pouvoir ; il va chercher à se venger. »

La mère Sanscœur tombait de surprise en surprise. Lamalice, voyant son dé perdu, raconta son aventure avec la souris, le présent de la fée et sa défense de révéler la vertu du dé et de le perdre.

La mère Sanscœur fut atterrée.

« Comment ravoir ce dé, tombé sans doute dans quelque coin où il reste inaperçu ?

— J’ai trouvé, dit Lamalice.

— Que vas-tu faire, pauvre fille ?