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Un quatrième verre fut avalé à la santé du capitaine, puis un cinquième pour le lieutenant. La tête de Frédéric commençait à s’échauffer. Les amis passèrent ensuite à l’eau-de-vie, dont Frédéric ne soupçonnait pas la force. Puis vinrent les chants, les rires, les cris. Alcide était ivre ; ses amis l’étaient plus encore ; ils l’étaient au point d’avoir oublié le magot dont ils avaient voulu s’emparer. Frédéric, qui avait conservé assez de raison pour se ménager, était un peu moins ivre que les autres, mais il n’avait plus ses idées nettes. Le tapage devint si fort qu’il attira l’attention du maréchal des logis ; on s’apprêtait à sonner la retraite.

« Que diantre se passe-t-il donc là-haut ? Quel diable de bruit font-ils ? Il faut que j’aille voir. »

Le maréchal des logis monta, entra et vit des bouteilles vides par terre, les hommes dansant, criant, chantant à qui mieux mieux.

le maréchal des logis.

Arrêtez ! Arrêtez tous ! Et tous à la salle de police !

alcide.

Ce n’est pas toi qui m’y feras aller, face à claques, gros joufflu. Essaye donc de me faire bouger. Je suis bien ici : j’y reste.

le maréchal des logis.

C’est ce que nous allons voir, ivrogne. Tu n’iras pas à la salle de police, mais au cachot. »

Le maréchal des logis voulut prendre Alcide au collet, mais celui-ci le repoussa.

le maréchal des logis.

Fais attention ! Un soldat qui porte la main sur son supérieur, c’est la mort ! »