Page:Ségur - Le mauvais génie.djvu/192

Cette page a été validée par deux contributeurs.
alcide.

Tu m’ennuies avec tes sottes pitiés, et tu es bête comme un oison, D’abord l’Anglais, qui est un imbécile fieffé, ne pensera pas à compter son argent ; il croira qu’il a tout dépensé ou qu’il a perdu ses pièces par un trou que j’ai eu soin de lui faire au fond de sa poche. Et, s’il se plaint, on lui dira que c’est Julien qui aura cédé à la tentation ; on fouillera dans les habits de Julien, on trouvera les pièces d’or ; l’Anglais, qui l’aime, ne dira plus rien : il emmènera son povre pétite Juliène, et on n’y pensera plus.

frédéric.

Mais mon père et ma mère y penseront, et ils croiront que Julien est un voleur.

alcide.

Qu’est-ce que cela te fait ? Ce Julien est un petit drôle, c’est ton plus grand ennemi ; il travaille à prendre ta place dans la maison et à t’en faire chasser. Crois bien ce que je te dis. Tu le verras avant peu.

frédéric.

Comment ? Tu crois que Julien… ?

alcide.

Je ne crois pas, j’en suis sûr. C’est un vrai service d’ami que je te rends… Mais parlons d’autre chose. As-tu envie d’avoir une montre ?

frédéric.

Je crois bien ! Une montre ! C’est qu’il faut beaucoup d’argent pour avoir une montre ! Et toi-même, tu n’en as pas, malgré tout ce que tu as chipé à tes parents et à d’autres.