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mon manteau de fourrure, le poil en dedans ; je me souvins que les Ostiakes (peuplades du nord de la Sibérie), qui se font des abris pareils dans la neige quand ils voyagent, mettent toujours leurs fourrures le poil en dehors. Ce moyen me réussit ; je n’eus jamais les membres gelés depuis. Un jour, l’ouragan et le chasse-neige furent si violents, que les perches de sapin furent enlevées ; je ne rencontrai personne qui pût m’indiquer mon chemin, et je m’égarai. Pendant plusieurs heures je marchai vaillamment, enfonçant dans la neige jusqu’aux reins, cherchant à me reconnaître, et m’égarant de plus en plus. La faim se faisait cruellement sentir ; mes provisions étaient épuisées de la veille ; le froid engourdissait mes membres ; je n’avançais plus que péniblement ; la fatigue me faisait tomber devant chaque obstacle à franchir ; enfin, au moment où j’allais me laisser tomber pour ne plus me relever, j’aperçus une lumière à une petite distance. Je remerciai Dieu et la sainte Vierge de ce secours inespéré ; je recueillis les forces qui me restaient, et j’arrivai devant une izba qui était à l’extrémité d’un hameau, dont les fenêtres s’éclairaient successivement. Une jeune femme se tenait près de la porte de l’izba. Je demandai à entrer ; la jeune femme m’ouvrit sur-le-champ, et je me trouvai dans une chambre bien chaude, en face d’une vieille femme, mère de l’autre.

« — D’où viens-tu ? Où te mène le bon Dieu ? me demanda la vieille.