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coin de l’église, priait et pleurait : mais elle se sentait fortifiée et consolée, comme si l’âme de son frère avait pénétré dans la sienne. Lorsque le cercueil quitta l’église pour se diriger vers le cimetière, Caroline le suivit de loin, et, tombant à genoux près d’un arbre qui la masquait presque entièrement, elle versa des larmes abondantes à la pensée de la longue séparation que le bon Dieu lui imposait. Mais, toujours soumise, toujours calme, elle remercia Dieu d’avoir accueilli son frère dans le séjour bienheureux et de lui avoir épargné de plus grandes et plus longues souffrances.

Pendant qu’elle priait et pleurait, elle se sentit doucement relever ; c’était le curé et le brigadier qui l’avaient aperçue en quittant le cimetière et qui venaient l’arracher à sa douleur. Le brigadier avait encore l’œil humide ; il releva sa fiancée sans parler, et, passant son bras sous le sien, il la ramena dans la demeure provisoire que lui avait assignée la douce charité du bon curé.

Les quinze jours qui précédèrent leur mariage se passèrent paisiblement ; la vieille Nanon n’osait pas trop gronder, retenue qu’elle était par la crainte du brigadier, qui lui avait fait un « hem ! » terrible un jour qu’elle commençait une légère attaque contre Caroline. Le jour du mariage fut aussi calme que les jours précédents ; M. Delmis et un de ses amis servirent de témoins à Caroline ;