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gribouille.

C’est pourtant vrai ce que tu dis. Tiens, laisse-moi t’embrasser. Tu as de l’esprit, toi ; tu as une manière de dire qui m’empêche de me fâcher. Tu me dirais : « Gribouille, tu es bête ; Gribouille, tu es sot ; Gribouille, tu es un animal… », je ne me fâcherais pas ; vrai, je ne t’en voudrais pas. Quelque chose me dit : « Gribouille, ta sœur t’aime, laisse-la dire ».

caroline, avec tristesse et affection.

Oui, Gribouille, je t’aime et je suis seule à t’aimer. J’ai promis à notre pauvre mère de te soigner, de te protéger, de t’aimer comme elle nous aimait. J’ai tenu ma promesse, Gribouille ; je t’ai placé avec moi dans cette maison, et je n’y resterais pas sans toi, si tu te faisais renvoyer… Et que deviendrions-nous ? Voilà pourquoi, mon pauvre frère, tu me chagrines quand tu fais mal. Je tremble que les maîtres ne se fâchent, ne te renvoient, et que tu ne viennes à souffrir du froid et de la faim.

gribouille, attendri.

Bonne Caroline ! Je ferai de mon mieux, je t’assure. Mais, vois-tu, on me dit toujours que je suis bête, et cela me trouble ; je ne sais plus ce que je fais, surtout quand ce maudit Jacquot se met à m’insulter.

caroline.

Mon pauvre Gribouille, fais ton ouvrage et rien de plus. Balaye, essuie, frotte, nettoie ; mais qu’avais-tu besoin de lâcher les oiseaux ? Pourquoi y touchais-tu ?