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L’AUBERGE DE L’ANGE-GARDIEN.

mon adresse pour que vous puissiez me faire savoir les nouvelles en cas de besoin.

MADAME BLIDOT.

Mais vous ne serez pas sans revenir pour en avoir par vous-même, monsieur Moutier ; car je considère ces enfants comme restant sous votre protection et vous appartenant plus qu’à moi.

MOUTIER.

J’en serais bien embarrassé si je les avais, ma bonne madame Blidot ; ils sont mieux placés chez vous que chez moi, qui n’ai pas de domicile ni d’autres moyens d’existence que mes deux bras. Mais voilà qu’il se fait tard ; ma journée a commencé avant le jour, et je ne serais pas fâché d’en voir la fin.

MADAME BLIDOT.

Que ne le disiez-vous plus tôt ? Je vous aurais mené à votre chambre qui est ici près au rez-de-chaussée donnant sur le jardin. Ma sœur et moi nous couchons là-haut ; c’est plus sûr pour deux femmes seules : non pas que le pays soit mauvais ; mais si quelque mauvais sujet vient faire du train…

MOUTIER.

Qu’il y vienne donc pendant que j’y suis : moi et Capitaine nous lui ferons son affaire, et lestement, je vous réponds. »

Madame Blidot sourit, alluma une chandelle et la porta dans la chambre préparée pour Moutier. Il la remercia, la salua, ferma sa porte, alluma un cigare, fuma quelque temps, tout en réfléchissant, fit un grand signe de croix, une courte prière, se coucha et s’endormit jusqu’au lendemain matin.

Il paraît qu’il dormit longtemps, car, à son réveil,