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madame Blidot, que je lui parle tout de suite. Mais, non, c’est impossible ; vous ne pouvez pas y aller pour cela. Envoyez-moi le curé ; je le lui enverrai à mon tour ; il me la ramènera, et à nous deux nous ferons votre affaire. Allez, mon ami, vite, vite, et puis allez voir vos enfants. »

Dérigny ne se le fit pas dire deux fois ; il n’avait pas encore vu ses enfants ; il ignorait qu’ils dormaient encore. Il alla lestement faire au curé la commission du général et courut à l’Ange-Gardien ; il y trouva madame Blidot seule. Il éprouva un instant d’embarras.

« Je suis seule éveillée, dit-elle en souriant. Ils sont tous éreintés, et ils dorment tous.

DÉRIGNY.

Je venais voir mes enfants, ma bonne madame Blidot.

MADAME BLIDOT.

Monsieur Dérigny, je suis bien aise que nous soyons seuls : j’ai à causer avec vous au sujet des enfants. Mon cher monsieur Dérigny, vous savez combien je les aime ; les perdre serait ma mort. Voulez-vous me les laisser ? »

Dérigny hésita avant de répondre. Madame Blidot restait tremblante devant lui ; elle le regardait avec anxiété ; elle attendait sa réponse.

« Jamais je n’aurai le courage de les reperdre une seconde fois, dit Dérigny à voix basse.

— Mon Dieu, mon Dieu ! s’écria madame Blidot en cachant sa figure dans ses mains, je l’avais prévu ! »

Elle sanglotait, Dérigny s’assit près d’elle.

DÉRIGNY.

Chère madame Blidot, si vous saviez combien votre tendresse pour mes enfants me touche !