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mais à la condition que madame Blidot épouserait l’homme indiqué par le général comte Dourakine, et qu’il se réserve de lui faire connaître. »

Le notaire ne put s’empêcher de sourire en voyant l’étonnement que causait cette clause du contrat, qu’il avait cherché vainement à faire supprimer. Le général y tenait particulièrement ; il n’avait pas voulu en démordre. Madame Blidot rougit, s’étonna, et puis se mit à rire en disant :

« Au fait, je ne m’oblige à rien, et personne ne peut m’obliger à me marier si je ne le veux pas.

— Qui sait ? dit le général, qui sait ? Vous le voudrez peut-être quand vous connaîtrez le futur.

— Pas de danger que je me remarie.

— Il faut signer, Messieurs, Mesdames, dit le notaire.

— Et puis dîner, » dit le général.

Madame Blidot ne fut nullement effrayée de cette annonce du général, quoique rien ne lui parût arrangé pour un repas quelconque ; mais elle commençait à compter sur cette espèce de féerie qui faisait tout arriver à point.

Elfy signa, puis Moutier, puis le général, puis madame Blidot, le curé, Jacques, Paul, Dérigny et la foule. Quand chacun eut apposé son nom ou sa croix au bas du contrat, le général proposa de retourner dîner à l’Ange-Gardien ; madame Blidot ne put s’empêcher de frémir de la tête aux pieds. Comment dîner, sans dîner, sans couvert, sans table !

« Général, dit-elle d’un air suppliant, si nous dînions ici ? C’est si joli !

LE GÉNÉRAL, avec malice.

Du tout, ma petite femme, nous dînons chez vous.