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LE GÉNÉRAL.

Monsieur le Curé, je viens vous dire que j’ai eu tort, grand tort ; je viens vous en faire mes excuses.

LE CURÉ.

Ce n’est pas moi, Monsieur, que vous avez offensé ; vous ne me devez aucune excuse.

LE GÉNÉRAL.

Si fait, parbleu ! c’est vous, puisque vous êtes l’homme de Dieu. Mais Moutier m’a pardonné ; n’est-ce pas, Moutier, que vous m’avez pardonné (se tournant vers Moutier, qui incline la tête en souriant). Alors, monsieur le Curé, je viens vous dire que, pour expier ma colère, je veux d’abord assurer l’existence de votre mauvais drôle de Torchonnet : vous me direz ce qu’il faut et ne vous gênez pas, demandez ce que vous voudrez. Et puis, Moutier m’a dit de vous demander conseil pour le reste. Que faut-il que je fasse ? Que voulez-vous que je fasse ? De quoi a-t-on besoin ici ? Dépêchez-vous, parce que le notaire vient demain, et, s’il faut acheter quelque chose, je le ferai tout de suite. »

Le curé restait abasourdi devant ce flux de paroles, dites très vite et très vivement. Il regardait Moutier qui ne pouvait s’empêcher de sourire de l’impatience visible du général et de l’embarras non moins visible du curé.

LE GÉNÉRAL.

Eh bien ! pas de réponse ? Qui ne dit mot consent. J’attends, monsieur le Curé, la liste de vos nécessités.

LE CURÉ.

Général ! je ne sais pas du tout… je ne comprends pas très bien…

LE GÉNÉRAL.

Que diantre ! c’est pourtant bien facile à compren-