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était le général, l’enfant était Torchonnet. Le général, ne voyant pas revenir Moutier et devinant une trahison, était sorti doucement de l’auberge, avait été au presbytère, où il trouva Torchonnet dans la salle. Le général s’était armé de son fouet à chiens ; il ne dit rien, mais ses yeux lancèrent des flammes quand il vit Torchonnet, rempli d’espoir, approcher mielleusement de lui en l’appelant son cher général. Il se jeta sur lui, lui arracha en moins d’une minute ses vêtements, ferma la porte à double tour, et commença à lui administrer le knout avec une vigueur qui provoqua les hurlements du coupable.


Il lui administra le knout.

Lorsque Moutier arrêta le supplice de Torchonnet, le général demanda à ce dernier s’il savait à présent ce qu’était le knout. Torchonnet continuait à hurler et à se rouler dans l’excès de sa souffrance. Moutier, dans la salle, et le curé, en dehors à la fenêtre, restaient immobiles, ne sachant quel parti prendre. À mesure que la colère du général se dissipait, la honte semblait le gagner. Lui aussi restait à la même place, sans faire un mouvement, sans dire une parole. Moutier fut le premier qui parla :

« Monsieur le curé, ayez la bonté de m’envoyer votre bonne ; je vais ouvrir la porte de la salle ; cet enfant a besoin de secours.

LE CURÉ.

Je vais revenir moi-même avec elle, mon ami. Il faut à ce garçon un pansement sérieux ; nous allons le couvrir de vin et d’huile, le baume du Samaritain de l’Évangile. »

Moutier alla ouvrir la porte ; ni lui, ni le curé, ni la bonne ne firent attention au général, qui paraissait de plus en plus honteux et embarrassé. La bonne et Mou-