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demi agenouillé, les mains jointes, le regard suppliant, le visage baigné de larmes.

MOUTIER.

Viens, mon pauvre enfant, embrasse ton papa et ne t’effraye pas ; il n’est pas mort, et dans quelques instants il t’embrassera lui-même, et te serrera dans ses bras. »

Jacques remercia du regard son ami Moutier et se jeta sur son père qu’il embrassa à plusieurs reprises. Dérigny, au contact de son enfant, commença à reprendre connaissance ; il ouvrit les yeux, aperçut Jacques et fit un effort pour se relever et le serrer contre son cœur. Moutier le soutint, et l’heureux père put à son aise couvrir de baisers ses enfants perdus et tant regrettés.

Après les premiers moments de ravissement, Dérigny parut confus d’avoir excité l’attention générale ; il se remit sur ses pieds, et, quoique tremblant encore, il se dirigea vers la maison, tenant ses enfants par la main. Arrivé dans la salle, suivi du général, de Moutier et des deux sœurs, il se laissa aller sur une chaise, regarda avec tendresse et attendrissement Jacques et Paul qu’il tenait dans chacun de ses bras, et, après les avoir encore embrassés à plusieurs reprises :

« Excusez-moi, mon général, dit-il veuillez m’excuser, Mesdames ; j’ai été si saisi, si heureux de retrouver ces pauvres chers enfants que j’ai tant cherchés, tant pleurés, que je me suis laissé aller à m’évanouir comme une femmelette. Chers, chers enfants, comment se fait-il que je vous retrouve ici, avec une maman, une tante, un bon ami ? (Dérigny sourit en disant ces mots et jeta un regard reconnaissant sur les deux sœurs et sur Moutier.)