Page:Ségur - L’auberge de l’ange gardien.djvu/163

Cette page a été validée par deux contributeurs.
157
L’AUBERGE DE L’ANGE-GARDIEN.

de dix mille francs en or et tout le reste. Et voilà comment j’ai les montres avec les chiffres toutes prêtes d’avance. Comprenez-vous maintenant ?

MOUTIER.

Parfaitement ; je comprends parce que je vous connais ; de la part de tout autre ce serait à ne pas le croire ; Elfy et moi nous n’oublierons jamais…

LE GÉNÉRAL.

Prrr ! Assez, assez, mes amis. Soupons, causons et dormons ensuite. Bonne journée que nous aurons passée ! J’ai joliment travaillé, moi, pour ma part ; et vrai, j’ai besoin de nourriture et de repos. »

Madame Blidot courut aux casseroles qu’elle avait abandonnées, Elfy et Moutier au couvert, Jacques et Paul à la cave pour tirer du cidre et du vin ; le général restait debout au milieu de la salle, les mains derrière le dos ; il les regardait en riant :

« Bien ça ! Moutier. Vous ne serez pas longtemps à vous y faire. Bon, voilà le couvert mis ! Je prends ma place. Un verre de vin, Jacques, pour boire à la prospérité de l’Ange-Gardien. »

Jacques déboucha la bouteille et versa.

« Hourra pour l’Ange-Gardien ! et pour ses habitants ! cria le général en élevant son verre et en le vidant d’un seul trait… Eh mais vraiment, elle est très-bien fournie la cave de l’Ange-Gardien ! Voilà de bon vin, Moutier. Ça fait plaisir de boire des santés avec un vin comme ça ! »

On se mit à table, on soupa de bon appétit ; on causa un peu et on se coucha, comme l’avait dit le général. Chacun dormit sans bouger jusqu’au lendemain. Jacques et Paul mirent leurs montres sous leur oreiller ; il faut même avouer que non-seulement Elfy resta longtemps