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L’AUBERGE DE L’ANGE-GARDIEN.

LE GÉNÉRAL.

Demandez à ces gamins qui grillent de parler ; ils vont vous faire un tas de contes.

JACQUES, riant.

Mon bon ami Moutier, je vous remercie des belles montres d’or que vous nous donnerez, à Paul et à moi, comme cadeau de noces.

MOUTIER, très surpris.

Montres d’or ! Cadeau de noces ! Tu es fou, mon garçon ! Où et avec quoi veux-tu que j’achète des montres d’or ? Et à deux gamins comme vous encore, quand je n’en ai pas moi-même ! Et quel cadeau de noces, puisque je ne songeais pas à me marier ?

JACQUES.

Voyez-vous, mon bon général ? Je vous le disais bien. C’est vous…

LE GÉNÉRAL.

Tais-toi, gamin, bavard ! Je te défends de parler. Moutier, je vous défends de les écouter. Vous n’êtes que sergent, je suis général. Suivez-moi ; j’ai à vous parler. »

Moutier, au comble de la surprise, obéit ; il disparut avec le général, qui ferma la porte avec violence.

LE GÉNÉRAL, rudement.

Tenez, voilà votre dot. (Il met de force dans les mains de Moutier un portefeuille bien garni.) J’y ai ajouté les frais de noces et d’entrée en ménage. Voilà la montre et la chaîne d’Elfy ; voilà la vôtre. (Moutier veut les repousser.) Sapristi ! ne faut-il pas que vous ayez une montre ? Lorsque vous voudrez savoir l’heure, faudra-t-il pas que vous couriez la demander à votre femme ? Ces jeunes gens, ça n’a pas plus de tête, de prévoyance