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L’AUBERGE DE L’ANGE-GARDIEN.

pas. Jacques voulait aller la chercher dans les poches de l’aubergiste.

« Pas la peine, mon ami ; je me passe de clef ; tu vas voir comment. »

Moutier donna un coup d’épaule à la porte : elle résista ; il donna une seconde secousse : un craquement se fit entendre et la porte tomba dans le charbonnier. Torchonnet eut une peur épouvantable ; il n’osait pas sortir du coin où il s’était réfugié. Jacques le rassura en lui expliquant pourquoi Moutier avait brisé la porte, et comme quoi le méchant Bournier allait être mis en prison par les gendarmes, qu’on attendait. Torchonnet ne pouvait croire à sa délivrance et à l’arrestation de son méchant maître. Dans sa joie, il se jeta aux genoux de Moutier et de Jacques et voulut les leur baiser ; Moutier l’en empêcha.

« C’est le bon Dieu qu’il faut remercier, mon garçon ; c’est lui qui t’a sauvé.

TORCHONNET.

Je croyais que c’était vous, Monsieur, avec le bon Jacques.

MOUTIER.

Je ne dis pas non, mon ami, mais c’est tout de même le bon Dieu qu’il faut remercier. Tu ne comprends pas, je le vois bien, mais un jour tu comprendras. Suis-nous, je vais te mener chez M. le curé.

TORCHONNET, joignant les mains.

Oh, non ! non, pas le curé ! pas le curé ! grâce, je vous en supplie !

MOUTIER.

Pourquoi cette peur de M. le curé ? Que t’a-t-il fait ?

TORCHONNET.

Il ne m’a rien fait, parce que je ne l’ai jamais appro-