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L’AUBERGE DE L’ANGE-GARDIEN.

bleurs indécis, se précipita dans les chambres qui se trouvaient près de la salle en appelant : « Monsieur Moutier, où êtes-vous ? Où est Jacques ? Que vous est-il arrivé ? On vient à votre aide ! » Elle ne tarda pas à entrer dans la pièce où étaient étendus l’aubergiste garrotté, le frère ne donnant aucun signe de vie, la femme évanouie. Moutier jetait de l’eau sur le visage saignant de l’étranger, qui était resté par terre ; il ignorait s’il n’y avait aucune blessure grave et si le sang dont il avait le visage inondé provenait d’une blessure ou d’un fort saignement de nez. À la voix d’Elfy, il se releva, et, allant à elle :

« Ma bonne, ma chère Elfy, je suis désolé de vous voir ici ; n’y restez pas, je vous en prie. Envoyez-moi du monde. Pourquoi êtes-vous venue ?

ELFY.

J’avais entendu le coup de pistolet et votre voix, je craignais qu’il ne vous fût arrivé malheur, et je suis accourue. Ils sont là dans la salle une douzaine d’hommes, mais ils n’osent pas entrer ; alors je suis venue.

— Sans avoir égard au danger ! Je n’oublierai pas cela, Elfy ! dit Moutier lui serrant affectueusement les mains. Non, jamais !… Mais, puisque vous voilà, appelez-moi du monde ; il faut soigner ces gueux-là, aller chercher les gendarmes et tirer d’ici ce pauvre monsieur qu’ils ont voulu tuer pour le voler sans doute. J’avais renvoyé Jacques près de vous avant d’entrer. »

Elfy, sans faire de questions, retourna à la salle, dit brièvement aux hommes ce que Moutier leur demandait, et retourna en toute hâte à l’Ange-Gardien pour rassurer sa sœur, qui était restée avec Paul. Elfy rencontra à la porte de l’auberge de Bournier le petit Jacques qui accourait aussi tout effrayé ; il avait entendu le coup de pistolet, et il se dépêchait d’arriver au se-