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« Monsieur, dit Jean, est-ce que M. le Voleur et M. le Peintre n’y seraient pas pour quelque chose ?

Abel, riant.

C’est possible ; je sais que M. le Peintre cherchait une terre à acheter en Bretagne.

Jean.

Oh ! monsieur, quel bonheur ! votre bonté ne se lasse jamais ! »

C’était réellement M. Abel qui avait acheté la ferme de Sainte-Anne pour y bâtir un château et s’y créer une résidence d’été. Cette acquisition fit le bonheur de Kersac et d’Hélène ; de Jean, qui se trouvait près de sa mère sept ou huit mois de l’année, et sans compter la famille qui habitait le château.

Quand Marie eut dix-huit ans, Kersac, qui l’aimait tendrement et qui n’avait pas eu d’enfants de son mariage avec Hélène, accomplit son projet d’autrefois ; il annonça qu’il adopterait Marie ; il restait la seconde partie du projet, la marier à Jean. Ce dernier avait vingt-sept ans ; il avait continué son service dans l’hôtel de Grignan, sauf un léger changement, c’est qu’il avait passé au service particulier de son bienfaiteur, de son maître bien-aimé, M. Abel. On pouvait, en parlant d’eux, dire avec vérité : Tel maître, tel valet. L’un était le beau idéal du maître, l’autre le beau idéal du serviteur.

Quand l’adoption de Marie fut annoncée, M. Abel, qui s’entendait avec Kersac pour faire réussir ce mariage, trouva un jour que Jean était devenu pensif et moins gai. Il lui en fit l’observation.