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Au moment où ils parlaient, ils virent la voiture revenant au grand trot : Kersac était sur le siège, près du cocher.

M. Abel.

Où diantre avez-vous été ? Pourquoi ne m’avez-vous pas attendu, Julien ?

Julien.

Je prie Monsieur de m’excuser, je croyais revenir à temps pour prendre Monsieur.

Kersac.

Ne grondez pas, monsieur Abel. C’est ma faute, voyez-vous. Pendant que vous faisiez vos saluts et vos compliments…

— Montons toujours, dit M. Abel ; vous m’expliquerez cela en voiture.

Kersac.

Je dis donc pendant que vous faisiez vos révérences et qu’on s’embrassait là-bas, moi qui avais fait dès hier tous les compliments que je pouvais faire, je me suis échappé pour examiner à fond votre belle bête. Plus je la voyais et plus je l’admirais. Je voulais la faire trotter : j’en mourais d’envie.

« — Si nous faisions un tour, dis-je au cocher, là où elle pourrait trotter bien à l’aise ?

« — Monsieur n’a qu’à sortir, me dit votre cocher, et ne pas me trouver, je serais en faute ; il est bon maître : j’ai regret quand je le mécontente.

« — Bah ! lui dis-je, ils en ont pour une demi-heure avant de se tirer de là. Et en une demi-heure on va loin avec une bête comme la vôtre.

« Le cocher était visiblement flatté ; il voyait que