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dans la poche de son gilet, de crainte des voleurs. Quand ils entrèrent dans ce magasin, Kersac ne pouvait en croire ses yeux ; l’étendue, la magnificence du local, la profusion des marchandises de toute espèce, l’éblouirent et le fixèrent sur le seuil de la porte. Ce ne fut qu’après les demandes réitérées des commis : « Que désirent ces messieurs ? » que Kersac put articuler :

« Un châle, monsieur. »

Un commis.

Quelle espèce de châle monsieur demande-t-il ?

Kersac.

Une belle espèce, monsieur.

Le commis, souriant.

Sans doute, monsieur ; mais serait-ce de l’Inde, ou bien anglais, ou français ?

Kersac, vivement.

Français, monsieur, français ; je n’ai pas de goût pour les Anglais, et, s’il faut tout dire, pour aucun pays étranger ; ce qui est français me va mieux que toute autre chose ; surtout pas d’anglais. »

Le commis fit circuler Kersac et Jean pendant près d’un quart d’heure avant d’arriver au quartier des châles.

« Voilà, monsieur, dit-il enfin. Brindé ! des chaises à ces messieurs. »

Brindé s’empressa d’apporter deux chaises ; elles étaient de velours ; Kersac passa la main dessus avant de s’asseoir et se plaça sur le petit bord, de peur d’aplatir ce beau velours bleu. Jean, plus