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Le baron, indigné.

Corrigé ma fille ? Quand donc ? Comment auriez-vous osé… ? C’est impossible. Vous ne savez ce que vous dites, mon cher.

Le chemineau, très humblement.

Pardon, excuse, monsieur le baron ; si votre petite demoiselle n’a pas porté plainte, c’est une grande bonté de sa part. Je suis un bonhomme, très affectionné aux enfants, mais, comme j’ai dit, j’avais du fil en quatre dans la tête, et, quand la jeune demoiselle m’a débité un tas d’injures et m’a craché en plein visage, j’ai dit : " C’est un enfant mal éduqué, ça : il faut la corriger. " Et j’ai fait comme j’aurais fait pour ma propre fille, je vous le jure, monsieur le baron, sans aucune méchanceté ; j’ai pris une baguette de la main droite, l’enfant de la main gauche, et je l’ai corrigée comme je l’aurais fait de ma fille, monsieur le baron, croyez-le bien… Ça m’est resté dans la tête. Quand j’ai eu repris mon bon sens, j’ai compris que j’étais un animal, que j’avais fait une grosse sottise. Je me suis informé du château ; on m’a indiqué le vôtre, monsieur le baron, et que c’était sans doute votre demoiselle que j’avais corrigée. Et je suis venu le plus tôt que j’ai pu pour vous faire mes excuses, ainsi qu’à Mme la baronne. Voilà l’histoire en toute vérité, monsieur le baron. »

Le baron et la baronne étaient atterrés ; Mme d’Orvillet était fort embarrassée de se trouver témoin d’une pareille découverte. Les enfants, qui