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étaient pâles de fureur, de terreur, de honte. Immobiles, les yeux écarquillés, les dents serrées, les mains crispées, ils n’avaient la force ni de parler ni de bouger. Les enfants Castelsot, rouges, humiliés, désolés, n’osaient pourtant pas remuer. Mme d’Orvillet était dans un embarras mortel ; elle avait beau tirer la redingote de son frère pour le faire finir, lui lancer des regards suppliants, il n’en continuait pas moins.

Gertrude remarquait l’embarras de sa tante et commençait à s’inquiéter.

Félicie seule regardait d’un air satisfait et dédaigneux ses amis d’hier.

Le général, content de l’attitude terrifiée des Castelsot, leur dit en finissant, les sourcils froncés et le ton sévère :

« Vous ne m’avez reconnu ni l’un ni l’autre à la noce Robillard, et je n’ai pas voulu vous parler en public. Aujourd’hui, vous venez chez ma sœur. Comme elle ne compte pas confier ses affaires ni sa maison à des gens qui ont fait fortune aux dépens de leur premier maître, vous n’avez rien à faire ici. Va-t’en, Futé, et que je ne te revoie plus ici, non plus que toi Clarisse. Emmenez vos deux petits grenidets, qui vous ressemblent trop pour être reçus dans une maison honnête… Allons, partez ! »

Et comme Castelsot ne bougeait pas :

« Vas-tu déguerpir, mauvais garnement ? »

Un cri rauque, semblable à un rugissement, sortit enfin de la grosse poitrine de Futé-Castelsot ; il courut plutôt qu’il ne marcha vers son équipage ;