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puisque j’ai commencé, j’avertis encore Madame que son vin fin, ses liqueurs disparaissent. Que Madame demande le malaga qu’on a débouché et à peine goûté l’autre jour ! J’ai dans l’idée qu’il ne se retrouvera pas et qu’Hilaire fera l’étonné comme si quelqu’un le lui avait pris. Il est si faux ! Nous commençons à le connaître, nous, et il faut que Madame le connaisse aussi.

Madame Gaubert.

Tout ce que vous me dites me surprend au dernier point, Sidonie ; je ne puis croire que vous ne soyez pas trompée par votre attachement pour moi ! Comment M. Guelfe, qui connaît ce pauvre Hilaire depuis sa naissance, qui l’a recueilli, élevé, qui l’a gardé chez lui jusqu’au moment où il l’a placé chez moi, comment eût-il été trompé à ce point ?… C’est impossible ! — Avant de parler à Hilaire, je veux voir M. Guelfe, l’interroger encore, lui raconter ce que vous venez de me dire, et…

Sidonie.

Que Madame veuille bien ne pas me nommer à M. Guelfe ; je l’en supplie ! Ce bon Monsieur est si trompé par Hilaire qu’il ferait croire à Madame que c’est moi qui suis coupable de haine et de calomnie contre son protégé. Et tout ce que j’ai dit à Madame par dévouement et par délicatesse de conscience tournerait contre moi.

Madame Gaubert.

Soyez tranquille ; je ne vous nommerai pas. Laissez-moi, Sidonie ; j’ai besoin de réfléchir avant de prendre un parti.