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mestique ; qui êtes-vous ? d’où venez-vous ? que voulez-vous ?

Le nègre.

Moi avoir dit : Moi Ramoramor ; moi veux manger ; moi veux voir Moussu Dormère ; voir petite maîtresse, mam’selle Geneviève ; moi voir bonne à petite maîtresse. Et moi avoir faim.

Le domestique.

Vous ne comptez pas vous établir ici, je pense, mon cher. Ce n’est pas une auberge chez nous.

Le nègre.

Moi veux rester ici toujours ; moi rester avec petite maîtresse.

Le domestique.

Il faut chasser cet homme ; il est fou !

La cuisinière.

Non, Pierre ; il n’a pas l’air ni fou ni méchant. Je vais lui donner à manger ; et puisqu’il connaît Monsieur et Mlle Geneviève, il faut qu’il attende leur retour.

Le nègre, riant.

Vous brave femme ; et moi vous être ami. »

La cuisinière se mit aussi à rire et plaça sur la table un reste de gigot, des pommes de terre, de la salade, la moitié d’un pain et un broc de cidre. Le nègre riait et découvrait ses dents blanches, que son visage noir d’ébène faisait paraître plus blanches encore. Il mangea et but avec un appétit qui fit rire les domestiques ; bientôt il ne resta plus rien de ce que lui avait servi la cuisinière. Ils entourèrent le nègre et lui firent une foule de questions. Ramoramor tournait la tête à droite et à gauche, mais il