L’aperçu qui précède peut suffire à montrer combien apparaissent diverses les sources du capitalisme au Moyen âge. C’est ne voir qu’une face de la question que de prétendre, comme le veut le professeur Sombart, que ce capitalisme est né, surtout de la propriété rurale des seigneurs, ainsi que de l’accroissement des propriétés urbaines et des rentes foncières, qui se trouvaient entre les mains du patriciat des villes[1]. Sans doute, c’est bien là une des sources du capitalisme, mais beaucoup moins féconde que le grand commerce international des marchandises et que le commerce de l’argent, qui en a été la conséquence. Le phénomène prépondérant, pour qui veut s’expliquer la cause première de l’accumulation des capitaux, ce sont les relations internationales, encore exceptionnelles au Moyen âge, mais qui cependant jouent déjà un rôle important.
Une dernière remarque. C’est surtout le commerce de l’argent qui donne naissance à la classe des nouveaux riches. Mais, à chaque génération, comme l’a si bien montré M. Pirenne, ce sont des hommes nouveaux qui apparaissent. Les descendants de ceux qui ont réalisé de grosses fortunes ne tardent pas à abandonner le monde des affaires ; achetant des seigneuries ou des propriétés urbaines, acquérant des rentes (rentes foncières et rentes émises par les princes et par les villes[2]), ils pénètrent dans les rangs de l’aristocratie foncière ou du patriciat des villes. En un mot, ils renoncent à l’activité économique, ils ne représentent plus que le passé ; et ce sont des nouveaux venus qui vont reprendre le flambeau et créer, à leur tour, des formes d’avenir qui précipiteront l’évolution du capitalisme moderne.