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Il nous semble que les effets de la hausse des prix, à laquelle Sombart attache une si grande importance, ne se sont guère fait sentir dans la première moitié du XIXe siècle ; c’est seulement dans la seconde que la rente foncière s’est fortement accrue et que la « mobilisation du sol » s’est produite[1].

En France, surtout jusque vers 1840, l’économie rurale rappelle de très près celle de l’Ancien Régime, bien que la condition sociale des paysans se soit améliorée, par suite de l’abolition du régime seigneurial et de la vente des biens nationaux, toutes deux œuvres de la Révolution. Mais ce sont toujours à peu près les mêmes procédés agricoles, malgré l’extension des prairies artificielles, malgré d’assez nombreux défrichements et les progrès de quelques cultures nouvelles, comme la pomme de terre. Seuls, les pays riches ont vu se réaliser des améliorations notables ; dans les régions arriérées, les progrès sont encore très lents.

C’est seulement à partir de 1840 que commence à se dessiner une transformation, qui n’atteindra toute son amplitude qu’après 1860. À cet égard, les progrès des voies de communication joueront un rôle de premier ordre, et il faut tenir compte aussi de l’application de la science à l’agriculture, du retour à la terre, surtout dans l’Ouest, après la révolution de juillet, de la classe des propriétaires nobles, légitimistes pour la plupart[2].

En Allemagne, surtout dans l’Allemagne de l’Ouest et du Sud, l’évolution ne semble pas avoir été très différente ; l’industrie rurale s’y est même conservée plus longtemps qu’en France : comme le montre W. Sombart, elle reste prospère jusque vers 1850. Seuls, les grands

  1. Voy. W. Sombart, ouv. cité, 1. II, ch. 5.
  2. Voy. H. Sée, Les progrès de l’agriculture de 1815 à 1848 (Revue d’Histoire économique, 1921) ; Demangeon, La Picardie, 1905 ; Sion, Les paysans de la Normandie orientale, 1909 ; Musset, Le Bas-Maine, 1917.