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s’informait de sa santé au repas, et Claire fut bien forcée de s’apercevoir de l’état misérable de son ami. Combien il l’aimait ! il ne pouvait donc pas vivre sans son amour. Il le lui avait bien dit, mais la vérité était éclatante. Claire en était touchée jusqu’au fond de l’âme. Sans doute ce que Claude avait fait était bien vilain, et dans son innocence elle se torturait vainement l’esprit pour comprendre le plaisir qu’il pouvait trouver à ces indécences qui froissaient vivement sa pudeur, tout en lui causant une émotion indéfinissable, mais sa colère ne pouvait tenir bien longtemps devant son amour.

Parmi les lois fatales de la vie de l’âme, il en est une reconnue de tous, car pour tous elle a été souventes fois ressentie, c’est le besoin pour nous de voir les lieux où nous avons été heureux. Un lambeau de notre âme y est demeuré, et c’est une partie de nous-mêmes que cet endroit où nous avons vécu d’une vie plus intense.

C’est à ce sentiment qu’obéissaient les deux enfants lorsqu’ils allaient rôder autour de la mare aux blancs nénuphars, voulant revoir sous la saulaie le coin de terre où ils s’étaient aimés. Un après-midi que Claire s’y était rendue, le cœur serré, elle vit Claude assis à la place habituelle : le pauvre garçon pleurait. D’un bond elle fut près de lui, s’agenouilla