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du château. Elle était déjà loin et l’on n’entendait plus les notes claires du rire des jeunes filles. Claude était toujours à la même place, songeur, enfiévré, regardant l’endroit où s’était assise la jeune fille, cherchant à prolonger par l’imagination la vision troublante qui était tantôt une réalité.

Une véritable révélation venait de se faire en lui : celle de son amour pour Claire de Messange. Il avait vécu depuis dix ans de la vie de la jeune fille, partageant ses jeux et ses études, assis à table à son côté, reposant la nuit dans une chambre contiguë à la sienne, se considérant presque l’un et l’autre comme frère et sœur, et jamais il ne lui était venu à l’idée que dans cette compagne de sa jeunesse il y avait une femme ; jamais il n’avait effleuré le corps de la chaste jeune fille d’une caresse inconvenante, et son esprit même n’avait pas évoqué à son sujet d’image dont il eût à rougir. Claude Larcher n’était pas un naïf, certes ! les jeunes filles du village auraient pu en témoigner ; mais c’était surtout un insouciant que l’amour n’avait jamais empêché de dormir et qui ne se préoccupait guère de chercher ce qu’il trouvait si facilement dans les vignobles et les granges du village où les belles filles au sang chaud de la plaine tourangelle sont loin de faire fi des avances