Page:Séché - Les Muses françaises, I, 1908.djvu/39

Cette page a été validée par deux contributeurs.
37
christine de pisan

Et moi aussi le veux ; car, se m’ait Dieux[1],
Au fort[2], c’était foleur[3], quand je m’avise[4]
 De refuser ami si gracieux.

Et j’ai espoir qu’il a tant de valeur[5]
En vous, que bien sera m’amour assise ;
Quand de beauté, de grâce et toute honneur,
Il y a tant, que c’est droit qu’il suffise[6]
Si est bien droit que sur tous vous élise.
Car vous êtes bien digne d’avoir mieux ;
Si ai eu tort, quand tant m’avez requise,
 De refuser ami si gracieux.

Si vous retiens, et vous donne m’amour.
Mon fin cœur doux, et vous pri, que fantise[7]
Ne soit en vous, ni nul autre faux tour ;
Car toute m’a entièrement acquise
Vo[8] doux maintien, vo manière rassise,
Et vos très doux et amoureux beaux yeux ;
Si aurai-je grand tort, en toute guise[9],
 De refuser ami si gracieux.


ENVOI


Mon doux ami, que j’ai m’sur tous et prise,
J’oy[10] tant de bien de vous dire, en tous lieux.
Que par raison devrai-je être reprise
 De refuser ami si gracieux.


BALLADE


Hé dieux ! que le temps m’ennuie !
 Un jour m’est une semaine ;
 Plus qu’en hiver longue pluie.

  1. Que Dieu m’entende
  2. Après tout
  3. C’était Folie
  4. Pour Quand je m’avisais
  5. Qu’il y a en vous tant de mérite, que mon amour sera bien placé
  6. c’est justice qu’on s’en contente.
  7. feinte
  8. Vo pour votres
  9. De toute façon
  10. J’entends.