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MADAME DE GIRARDIN
DELPHINE GAY

Celle qu’on psut appebr la Muse du Romantisme naquit à Aix-laChapalle le 26 février 1804. Sa mère, Sophie— Marie-Françoise Michault de la Vallette avait épousé en secondes noces M. Gay, receveur général du département de la Roër.

A seize ans, Delphine Gay, éblouissante d’esprit et de beauté fit son entrée dans les salons de la Restauration et attira tous les regards. Son premier grand succès poétique date de cette époque : en 1820, l’Académie Française lui décerna un prix extraordinaire pour une pièce de vers où elle célébrait l’héroïque dévouement de quelques reUgieuses française ;  ?, lors de la i)este de Barcelone.

Célèbre du premier coup, Delphine Gay, avant d’imprimer ses vers les récitait dans les salons, d’une voix enchanteresse et avec des attitudes de Sapho. Nous avons là-dessus les témoignages enthousiastes de tous les contemporains. Mme d’Agonit la dépeint ainsi : « Delphine Gay disait bien, sans emphase ; son organe était plein et vibrant, son attitude décente, son air noble et sévère. Grande et un peu forte, la tête fièrement attachée sur un cou antique, le profil aquilin, l’œil clair et lumineux, elle avait dans toute sa personne un air de sibylle, accoutrée et quelque peu façonnée à la mode du temps. »

On assure que sa grande beauté avait suggéré l’idée à quelqu’un de l’entourage du Comte d’Artois d’amener une liaison entre la jeune poétesse et le prince. La mort de Louis XVIII interrompit l’ébauche de ce roman.

Pendant un voyage que Delphine Gay fit avec sa mère en Italie (1827) elle fut véritablement acclamée. On la nomma de l’Académie du ïibre. Elle est alors comme enivrée de tous les hommages qu’on lui rend et elle se croit vraiment appelée ; jouer un granil rôle de poète.

Ecoutons-la s’écrier :

Oui, de la véri’é rallumant le flambeau,
J’enflammerai les cœurs de mon noble délire ;
On verra l’imposteur trembler devant ma lyre ;
L’opprimé, qu’oubliait la justice des lois, »
Viendra me réclamer pour défendre ses droits.
Le héros, me cherchant au jour de sa victoire,
Si je ne l’ai chanté, doutera de sa gloire :
Les autels retiendront mes cantiques sacrés.
Et fiers, après ma mort, de mes chants inspirés.
Les Français me pleurant comme une sœur chérie ;
M’appelleront un jour Musc de la Patrie !

Les Français, est-il besoin de le dire, se souviennent fort peu de ses vers patriotiques, plus nt)bles de sentiment que neufs d’expression, plus