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« Dame fait-il, grand gré vous sais
De votre amour, grand joie en ai… »
— La Pucelle lui répondit :
« Ami, vous dis un grand merci… »

Ils vécurent alors dans les délices de l’amour — amour d’ailleurs tout platonique. Mais voilà que brusquement Eliduc est rappelé dans son pays que l’ennemi ravage. Quand elle apprend ce départ, Guilliadon se pâme de douleur.

Quand Eliduc la vit pâmer,
Il commence à se lamenter,
La bouche lui baise souvent,
Et il pleure moult tendrement ;
Entre ses bras la prit et tînt,
Tant que de pâmoison revint.
« Par Dieu, fit-il, ma douce Amie,
Souffrez un peu que je vous die.
Vous êtes ma vie et ma mort :
Et en vous est tout mon confort.
Pour ce je prends conseil de vous
Car confiance est entre nous.
Par besoin vais en mon pays,
De votre père ai congé pris
Mais je ferai votre plaisir
Quoiqu’il doive m’en advenir. »
« Or, fait-elle, m’emmènerez.
Puisque demeurer ne voulez. »

Eliduc ne veut accepter. Mais, dit-il.

« Si congé, me voulez donner
Et jour de retour me fixer
Si vous voulez que je revienne
N’est rien au monde qui me tienne… »
Elle vit bien son grand amour
Terme lui donne et fixe jour,
Pour venir et pour l’emmener.
Grand dol eurent à se quitter
Leurs anneaux d’or entréchangèrent
Et doucement s’entrebaisèrent.

De retour en son pays, Eliduc est fêté par ses amis et surtout par sa femme qui avait hâte de le revoir. Mais lui ne songeait qu’à Guilliadon. Et, dès que son roi n’a plus besoin de lui, il