Page:Séché - Les Muses françaises, I, 1908.djvu/170

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

VICTOIRE BABOIS




Jean-Baptiste Babois et Marguerite Lapoulide, sa femme, étaient d’aisés commerçants de Versailles. Ils eurent une fille, Marguerite-Victoire, qui naquit le 8 Octobre 1760.

L’éducation de la petite Victoire, selon ses propres expressions, fut bornée aux instructions convenables à son sexe. C’est-à-dire qu’elle n’apprit pas grand chose. Comme elle était sérieuse et restait volontiers à la maison, elle lisait. Son auteur favori était Racine.

Au demeurant. Victoire Babois n’était pas heureuse, elle ne devait d’ailleurs jamais l’être. — Jeune fille, ses parents contrarient ses goûts pour l’étude ; mariée, elle ne sera guère mieux partagée… mère, tout son besoin d’affection se portera sur sa fille, mais la mort jalouse lui ravira bientôt le doux objet de sa tendresse. Elle aura été vraiment, ainsi qu’elle l’a écrit :

Amie, épouse, fille et mère infortunée.

Elle avait épousé un certain M. Vict.

Ce fut la perte de sa fille qui lui dicta ses premières poésies, ces Élégies qui eurent, dans leur temps, un très grand retentissement.

Ducis lui écrivait :

« Née pour être amante, épouse, mère et patriote passionnée, pour être excellente fille, fidèle et généreuse amie, vous avez dû souffrir beaucoup. Telle a été votre destinée. Mais, votre douleur maternelle, confiée à vos éloquentes élégies, vivra longtemps dans vos vers ! »

Peut-être le bon Ducis s’exagérait-il quelque peu la durée de la réputation de celle dont il avait fait sa nièce adoptive. Mais, pour de vrai, ces élégies sont le meilleur de l’œuvre de Victoire Babois. On y rencontre des vers bien frappés, et le sentiment sincère qui les a inspirées leur donne le mouvement et l’émotion qui font trop souvent défaut aux autres pièces de l’auteur.

Victoire Babois mourut le 8 mars 1839.

BIBLIOGRAPHIE : Élégies et poésies diverses, Paris, 1810, in-8o, — même ouvrage, Paris 1828, 2 vol. in-12. — Élégie sur la mort de Ducis, Versailles, 1816 in-8o. — Deux romances (la petite Harpiste, ou l’Amour au Mont-Géant) Paris, 1816. — Élégies sur la mort de sa fille, Paris, an xiii, in-12. — Épître aux romantiques, Paris 1830, in-18.

Il faut encore ajouter à ces diverses éditions, une pièce, à Ma Muse, Insérée à la suite de la notice que Mlle Sophie Ulliac Tremadeure a consacrée à Mme Babois dans la Biographie des femmes auteurs contemporaines françaises, Paris, 1836, in-8o.


ÉLÉGIE

Toi qui fis de mes jours le charme et le tourment,
Toi que tant de soupirs rappellent vainement,
Ma fille ! cher objet d’amour et de souffrance,