Sans dessein, sans choix, sans étude,
D’autres soupirent tout le jour ;
Un certain reste d’habitude
Les fait encor parler d’amour.
Enfin la mort aux morts ne laisse
De leur amour qu’un souvenir ;
Sans que leur défunte tendresse
Leur puisse jamais revenir.
L’objet agréable ou funeste
Sur eux fait peu d’impression ;
Ombres qu’ils sont, il ne leur reste
Que des ombres de passion.
D’en naître là, point de nouvelle.
Chaque Blondin vaut un Barbon ;
Et la plus jeune Demoiselle
Y paraît cent ans, ce dit-on.
C’est une chose insupportable
Que l’entretien d’un trépassé :
Car que fait-il, le misérable,
Que des contes du temps passé ?
C’était en vain qu’ils s’enflammaient
Maintenant les Dieux me punissent.
Je haïssais ceux qui m’aimaient
Et j’aime ceux qui me haïssent.
Mon cœur n’y saurait résister,
Je n’ai plus ni pudeur ni honte,
Je cherche partout qui m’en conte
Personne ne m’en veut conter.
En vain je soupire et je gronde
Mes destins le veulent ainsi.
Et les prudes de l’autre monde
Sont les folles de celui-ci.
— Las, je connais une insensible
Dans le monde que j’ai quitté
Plus cruelle et plus inflexible
Que vous n’avez jamais été.
Galants, abbés, blondins grisons
Sont tous les jours à sa ruelle.
Lui content toutes leurs raisons.
Et n’en tirent aucune d’elle.