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donné généreusement, « l’exhortant le premier à continuer dans l’ode. » Qu’y a-t-il de vrai dans cette histoire ? Sainte-Beuve estime que ce fut une pure espièglerie d’écolier et de camarade. J’aime à le croire, aussi moi, pour l’honneur de Joachim du Bellay.

Du reste, ce qui prouve que cette querelle ne fut jamais bien sérieuse, c’est que par la suite les deux poètes furent plus étroitement liés que jamais.

Quoi qu’il en soit, Joachim du Bellay joua le rôle de précurseur en publiant la Défense et illustration de la langue françoise, un an avant l’édition des premières poésies de Ronsard[1].

La Défense exerça sur la littérature française du seizième siècle au moins autant d’influence que la préface de Cromwell sur la littérature du dix-neuvième. Ce fut un coup de trompette formidable et l’on en retrouve les échos dans tous les ouvrages du temps. La Défense aurait suffi pour immortaliser son auteur. Quelques mois plus tard parut l’Olive. Joachim du Bellay était évidemment pressé de mettre ses leçons en pratique et de montrer à la nouvelle école comment elle pourrait « endormir l’importun croassement des corbeaux » qui l’avaient appelé « hardi repreneur. » L’Olive ne répondit pas à l’attente générale ; elle n’offrait d’intérêt réel que dans l’entrelacement original des cinquante sonnets qui la composaient. Jusque-là les poètes ne s’étaient guère servis que de l’ancienne strophe assonante des trouvères ; le sonnet était pour

  1. La Défense parut au mois de février 1549. Dès le 20 mars 1548 un privilège commun avait été accordé au libraire Arnoul l’Angelier pour la Défence et pour l’Olive.