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— Je veux voyager, ma mère, dit-il un jour ; je sens que ma place n’est point ici.

— Tu es un sot : reste avec moi, tu seras tranquille et personne ne te contrariera. Ne sais-tu pas que pierre qui roule n’amasse pas mousse ?

— Je suis résolu à parcourir le monde : aucun homme n’a pu jusqu’ici se vanter de m’avoir vu trembler, et je ne pense pas que jamais on puisse me faire peur.

— Eh bien ! puisque tu es décidé à quitter la maison de ton père, je vais te donner un conseil dont tu te trouveras bien si tu consens à le suivre : ne voyage jamais que d’un soleil à l’autre, et ne manque pas de t’arrêter pour te coucher quand le jour fera place à la nuit.

Jean embrassa sa mère qui pleura en le voyant partir, et il emmena un âne pour porter son bagage qui n’était pas des plus lourds.

Il marcha tout le jour ; quand vint la nuit, il s’étendit dans le creux d’un fossé sur un tas de feuilles mortes, et ne s’éveilla qu’en entendant les oiseaux gazouiller dans les branches au-dessus de sa tête.

À la fin de la seconde journée, comme il cherchait un endroit où se reposer, il aperçut, aux dernières lueurs du soleil qui disparaissait derrière les arbres, une petite chapelle ; elle n’était pas fort éloignée, mais quand il y arriva, la nuit était tout à fait tombée. Il attacha son âne à un arbre, et entra dans la chapelle.

Elle était toute délabrée, les fenêtres n’avaient plus de vitraux, et la porte fermait mal ; mais Jean n’était pas difficile, et il pensa