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bien que tout petit, avait l’air vieux, vieux comme les plus âgés de la paroisse.

Quand la mère revint de la fontaine, elle alla au berceau, et au lieu de son fils, elle aperçut le petit monstre qui y était à sa place ; elle jeta un cri, et courut chez sa voisine.

— Ah ! lui dit-elle en pleurant, on m’a volé mon enfant, et à sa place on a mis un vilain poupon qui a la mine d’un vieillard.

— Ce sont, répondit la voisine, les fées de Chêlin qui ont fait le changement. Si tu veux ravoir ton fils, voici comment il faut t’y prendre. Tu vas allumer dans le foyer une grande fouée de feu ; quand le bois flambera, tu casseras des œufs, et tu mettras les coques tout autour du foyer parmi la cendre, puis tu rempliras d’eau les coquilles comme si tu voulais la mettre à bouillir. Ensuite tu prendras l’enfant sur tes genoux et tu écouteras ce qu’il dira.

La femme se hâta de faire ce que lui avait dit sa commère ; et quand le feu fut allumé, et l’eau mise à bouillir dans les coques d’œufs, elle alla chercher l’enfant dans le berceau et l’approcha du foyer comme pour lui réchauffer les pieds.

L’enfant regarda autour de lui d’un air étonné, puis il s’écria :

— Ah ! j’ai plus de cent ans,

Jamais je n’avais vu tant de p’tits pots bouillants.

Quand la femme entendit ces paroles, elle saisit un couteau, et s’écria :

— Ah ! petit sorcier, je vais te tuer !

Aussitôt elle vit paraître devant elle une fée qui lui dit :

— Ne fais pas de mal à mon fils, je vais te rendre le tien.

Elle disparut et revint peu après, apportant l’enfant qui était bien soigné et n’avait eu aucun mal ; puis elle dit :