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Demande-moi ce que tu voudras et je te l’accorderai, car j’ai le pouvoir des fées. Mais dépêche-toi de me reporter à la mer, et ne perds pas de temps, je faiblis déjà, et je mourrais bientôt.

— Qu’en dis-tu ? demanda Olérie à son mari.

— Si tu y consens, je veux bien la remettre à la mer ; ce serait dommage de la tuer, elle est bien gentille et elle n’a jamais fait de mal à personne.

Ils prirent le panier chacun par un bout ; et portèrent tout doucement la Sirène à la mer, et ils la laissèrent s’y plonger sans avoir songé à lui faire de conditions.

Quand elle sentit la fraîcheur de l’eau, elle s’esclaffa de rire, de la joie qu’elle avait de n’être plus en captivité, et elle dit au sabotier :

— Que me demandes-tu à présent ?

— Je désirerais, répondit-il, du pain, du poisson et des habits pour moi, ma femme et mes enfants.

— Tu auras tout cela dans vingt-quatre heures, dit la Sirène.

— Je voudrais bien aussi, poursuivit-il, si c’était un effet de votre bonté, un peu d’argent pour payer mon maître, car je ne suis guère riche.

La Sirène ne répondit rien ; mais elle se mit à battre l’eau avec ses nageoires, et à chaque fois qu’elle frappait les vagues, il jaillissait des gouttelettes, et tout ce qui sautait en l’air était de l’or qui venait tomber aux pieds du sabotier.

Le rivage en fut bientôt couvert : alors elle cessa de s’agiter, et elle dit au sabotier et à sa femme :

— Tout cela est à vous, bonnes gens ; vous pouvez le ramasser.