Page:Sébillot - Contes de terre et de mer.djvu/132

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sonnière ; aussitôt le navire déploya ses voiles et se mit en route, avant, tribord et babord, et il marchait comme le vent. Ils furent trois jours sans voir aucune terre ; le quatrième, ils aperçurent une île à perte de vue, et ils mirent le cap dessus. Comme Jean des Merveilles en approchait, il vit un navire, deux navires, trois navires ; il en compta jusqu’à quinze qui étaient auprès de l’île ; l’un d’eux s’avança vers lui. Il commanda la manœuvre à ses hommes ; mais, comme son navire n’avait pas hissé son pavillon, le corsaire qui venait à sa rencontre tira deux coups à blanc, puis un troisième à boulet.

— Ah ! commanda Jean des Merveilles, chargez la moitié des canons avec des boulets et l’autre moitié avec de la mitraille, et puis feu partout.

Mais ses hommes ne bougeaient pas, et il était si en colère que, de rage, il se serait bien roulé par terre. Le corsaire arriva et ses hommes sautèrent à l’abordage ; mais les matelots de Jean les laissaient monter à bord sans même essayer de leur résister.

Quand il vit cela, il songea à son pouvoir et dit :

— Coque de noix, deviens un petit navire où il y ait seulement place pour moi, et tire-moi de ce mauvais pas.

Aussitôt il se trouva dans une petite chaloupe, et les matelots qui étaient à bord se noyèrent ; au même instant le chef des corsaires, qui était l’ennemi de la fée qui avait donné la coque de noix à Jean des Merveilles, fut changé en un gros chat noir qui lui dit :

— Tu as cent ans à être prince, et moi cent ans à rester chat.

Jean des Merveilles aborda à l’île : il délivra la princesse, et ordonna à son petit bateau de se changer en un beau navire. Il monta à bord avec la princesse, et fit un heureux voyage ; quand il arriva à Paris, le roi fut bien content de le voir et il lui donna sa fille en mariage.