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pilote, qui était un bel enfant à la mine éveillée et intelligente, ils se dirent : « Voici notre affaire ; il est inutile d’aller plus loin. »

Ils donnèrent à boire et à manger au pilote, puis lui dirent qu’il pouvait descendre dans sa barque, et qu’on n’avait plus besoin de lui. Quand il fut dans son bateau, il demanda son fils, mais les gens du navire déclarèrent qu’ils allaient le garder, et le vaisseau s’éloigna à toutes voiles, laissant le malheureux père se désoler de la perte de son unique enfant.

Le vaisseau arriva à la capitale du royaume de Naz : il salua la ville en tirant vingt et un coups de canon, et la ville répondit par une salve pareille. Le petit Français fut mené à la cour et le roi fut charmé de sa gentillesse. Il le fit élever avec soin, comme s’il eût été son propre fils, et lorsqu’il eut atteint l’âge de dix-huit ans, il le maria à sa fille qui avait aussi dix-huit ans.

Quand le fils du pilote se vit dans l’abondance et la richesse, il songea à ses vieux parents.

— Ils n’étaient pas bien riches lorsque je les ai quittés, je serais content de les revoir et de les mettre à l’aise sur leurs vieux jours.

Il fit part à sa femme de son désir ; elle le trouva fort naturel, et elle dit qu’elle voulait l’accompagner dans son voyage. Dans le royaume de Naz, les filles et les femmes sont toujours voilées et les maris ne voient la figure de leur femme que lorsqu’elles sont devenues mères. Quand l’époux de la princesse alla demander à son beau-père la permission d’aller à Boulogne, le roi avant d’y consentir fit jurer à son gendre de ne pas chercher à voir la figure de sa