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fait, le résultat final eût été le même. Entre les deux, dans la nuit du 12 au 13, un peu après onze heures, j’aperçois simplement un intervalle de quelques minutes pendant lequel il a eu le choix entre deux lignes de conduite. À cet instant précis s’est décidé — non pas certes le sort de la France, il ne dépendait malheureusement plus de nous — mais celui d’Émile Ollivier.

Premier ministre en fait (quoiqu’il n’ait jamais eu ce titre), il apprend de M. de Gramont que l’Empereur a accompli un acte d’où peut sortir la guerre. Il n’a pas été consulté. Il n’a même pas été averti. Que ne dégage-t-il sa responsabilité ? Que ne donne-t-il sa démission ? S’il l’eût donnée, il eût été, au lendemain de la guerre, l’homme populaire entre tous. Avec son talent incomparable, son dévouement sans bornes à la chose publique, il eût exercé une influence bienfaisante sur la politique intérieure de notre pays.

Mais pouvait-il, devait-il donner sa démission ? Désavouer l’acte de l’Empereur, c’était, au cas où la guerre éclaterait, avoir déclaré solennellement, devant l’Europe et devant l’histoire, que l’Empire était l’agresseur et que la France était dans son tort. C’était aussi laisser la place libre à un ministère de droite, qui attendait dan la coulisse, et qui eût été un ministère de guerre. En restant, pouvait essayer de réparer le mal. Par le fait, Ollivier le répare dans la mesure du possible, puisqu’il obtenait du Conseil des ministres, quel-