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viction qu’Émile Ollivier monta à la tribune, le 15 juillet, pour affirmer la nécessité de la guerre. Il se jeta en avant comme d’habitude, couvrant généreusement l’Empereur, revendiquant pour lui et pour son ministère toute la responsabilité. Après avoir dit, au début de son discours : « Nous nous décidons à cette guerre, l’âme désolée », il s’écria, pour conclure : « De ce jour commence, pour mes collègues et pour moi, une grande responsabilité ; nous l’acceptons d’un cœur léger. » Comme la gauche interrompait bruyamment : « Oui, d’un cœur léger ; et n’équivoquez pas sur cette parole, et ne croyez pas que je, veuille dire avec joie ; je vous ai dit moi-même mon chagrin. Je veux dire d’un cœur que le remords n’alourdit pas, d’un cœur confiant. » (Hélas ! on devait bien vite oublier l’« âme désolée », tandis qu’on retiendrait, détourné de son sens, le « cœur léger » !). C’est ainsi que la guerre fut déclarée.

En résumé, Ollivier avait d’abord, à force de droiture, déjoué l’intrigue de Bismarck ; puis il avait subi une situation créée par l’Empereur ou par son entourage, et d’où Bismarck était cette fois décidé, en brusquant les choses, à faire tout de suite sortir la guerre. Son rôle dans cette affaire se décompose ainsi en deux parties, nettement séparées par la nuit du 12 au 13 juillet : dans la première, je ne vois pas comment il eût pu faire mieux ; dans la seconde, je me demande s’il eût pu faire autrement ; et en tout cas, quoi qu’il eût