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machination de la Prusse, elle s’adresserait à Berlin. Mais elle n’y trouverait ni le roi ni son ministre, car Guillaume serait à Ems et Bismarck à Varzin. L’opinion publique, à Paris, aurait ainsi tout le temps de se surexciter. Quand les passions seraient suffisamment échauffées, Bismarck se montrerait, crierait à la provocation, ameuterait les Espagnols, et serait bien maladroit s’il n’arrivait pas à faire sortir de là une guerre, où l’Espagne serait peut-être aux côtés de l’Allemagne.

Par bonheur pour nous, une indiscrétion ébruita l’affaire avant qu’elle fût venue devant les Cortès. Dès le 2 juillet, la nouvelle de la candidature Hohenzollern se répand à Madrid. Dans la journée du 3, la bombe éclate à Paris. Amis et ennemis de l’Empire se trouvent aussitôt d’accord : on ne tolérera pas cette nouvelle provocation de la Prusse. Jules Favre, Jules Simon, Gambetta, ne sont pas les moins violents. Mais Émile Ollivier est l’homme de la paix : il est à peu près seul à la prêcher depuis 1866. Sa décision est immédiatement prise : on évitera la guerre en tuant la candidature Hohenzollern dans l’œuf. À Berlin, notre ambassadeur Benedetti ne trouve personne à qui parler ? Eh bien ! au risque de froisser le protocole, il ira chercher le roi à Ems, pendant sa cure. En attendant, pour donner à l’opinion publique la satisfaction qu’elle réclame, et aussi pour que le peuple espagnol sache à quoi s’en tenir, on