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que des personnes. Mais dès 1857 il écrivait à ses électeurs : « Le temps des phrases est passé, celui de la science commence. » En cela il allait, je crois, un peu vite : pendant quelque temps encore, les démocraties devaient poser en principe qu’on sait une chose quand on est capable d’en parler. Il n’en est pas moins vrai que l’homme qui professait de telles idées ne se souciait pas beaucoup de l’étiquette du régime. Sa sympathie pouvait aller à peu près indifféremment à la République ou à l’Empire, pourvu qu’il trouvât dans l’un et dans l’autre beaucoup d’autorité virtuelle en haut, beaucoup de liberté réelle en bas. Il eût revendiqué cette liberté, et il eût appelé de ses vœux cette autorité, sous quelque régime qu’il eût vécu. Si ç’avait été la République, il l’aurait voulue autoritaire. Puisque c’était l’Empire, il le voulait libéral.

Mais, en voulant que l’Empire fût libéral, il devait nécessairement avoir contre lui à peu près tous les hommes en vue, et ceux qui servaient le régime et ceux qui constituaient l’opposition.

Ceux qui détenaient les fonctions électives ou administratives depuis le coup d’État ne pouvaient voir dans l’Empire qu’un régime de compression, destiné à rester indéfiniment, avec eux, ce qu’il avait été au premier jour. Seuls, ou peu s’en faut, devaient comprendre Ollivier les deux hommes qui avaient conçu et voulu l’Empire : le duc de Morny et l’Empereur lui-même. Morny fut tout de