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ans. On lit à l’une des premières pages, à la date du 11 juillet : « S’imposer une mission élevée, un rôle glorieux. Dieu veuille que le mien soit de défendre tous les droits méconnus ! » Et un peu plus loin : « Faisons, autour de nous, taire le bruit extérieur. Il faut que la délibération de notre conduite se passe au plus profond de notre conscience, en présence de Dieu seul. » Et quelques jours après : « À chaque action nouvelle, se représenter le tribunal de Dieu, et se demander si ce juge miséricordieux et terrible la justifierait. » Le journal continue ainsi, tellement indifférent aux choses de la vie journalière qu’on s’étonne d’y trouver des indications de dates : elles n’ont été mises là, semble-t-il, que pour rappeler l’existence du temps à une âme ivre d’éternité. D’un bout à l’autre, l’accent est religieux. Religion naturelle, qui venait à Émile Ollivier du plus profond de lui-même. Malgré le respect et l’admiration qu’il eut toujours pour le catholicisme, il s’en tint, pour sa part, à ce spiritualisme inné. Mais à son spiritualisme il trouvait l’aliment le plus approprié dans Pascal, dans Bossuet, et surtout dans l’Imitation : aux heures où les églises sont solitaires, a dit un témoin de sa vie, il venait s’y asseoir et y méditer.

Sur les hauteurs où il aimait ainsi à se tenir, Émile Ollivier fut toujours un isolé, malgré sa sociabilité très grande. Il ne releva jamais que de lui-même. Une seule fois dans sa vie il fit partie