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éloquence pourtant si riche et si pleine, que l’analyse y découvrira, une à une, les qualités et connaissances qui font le juriste, le moraliste, l’historien, le poète et même le musicien, comme le prisme fait apercevoir les couleurs de l’arc-en-ciel dans un rayon de lumière blanche. Toutes les formes possibles de l’éloquence surgiront au cours de ce siècle qui sera, de tous les siècles de l’histoire, celui où l’on aura le plus parlé : la tienne aura le privilège d’enchanter les délicats en entraînant la foule, de dédaigner les moyens matériels pour aller droit aux âmes, et d’imprimer à la consécution des phrases et des mots un tel caractère de nécessité, une si évidente marque de prédestination, que la puissance et l’éclat de ta parole sembleront n’être que la force et la splendeur de la vérité. À d’autres le titre d’homme éloquent : tu seras l’éloquence même. » J’ai vu, Messieurs, quelques-uns de ceux qui avaient entendu M. Émile Ollivier. Quarante ans avaient passé sur ce qu’ils éprouvèrent, et ils n’étaient point encore revenus de leur émerveillement. Après de vains efforts pour exprimer ce qu’ils déclaraient d’abord inexprimable, ils finissaient, les uns et les autres, par mettre l’accent sur deux points : l’incomparable richesse de ce génie oratoire, et sa spiritualité très haute. Mais ne faisaient-ils, par là, que caractériser la parole de votre confrère ? Ils donnaient aussi bien, ce me semble, les traits essentiels de son œuvre et de sa personne.