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fragiles mais nobles. Tout en secouant à vos paroles enthousiastes une tête sceptique, j’aime votre pensée et le sentiment d’où elle jaillit. Ange naïf, vous êtes beau : c’est l’important.

Plus que les autres réformateurs, les antisémites vous paraissent approcher la vérité. Il vous arrive, ange vraiment trop naïf, d’appeler Édouard Drumont, juif en chef de l’antisémitisme, « le prophète contemporain » et de le compter « parmi les héros auxquels la couronne de gloire sera remise par les anges au jour bienheureux du festin mystique. » Mais votre antisémitisme n’est pas le sien. Vous n’aimez pas les brutalités, les haines personnelles, les proscriptions inutiles. Vous prêchez « l’antisémitisme moral ». Votre cri de guerre est admirable : « À bas l’or ! ». Vous vous attaquez au sémitisme de nos cœurs. Vous nous dites avec une sévérité trop justifiée : « Vous vous refusez à compter parmi vos frères » les juifs « et vous prodiguez votre vénération à leurs idées et à leur morale. » Combien, parmi nos antisémites catholiques, comprendront comme vous les paraboles évangéliques et le « pieux dédain des biens et des richesses ? »

Loin d’être restés pauvres d’esprit, ils pro-