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émut par une apparence de bravoure. Mais au moment de sa fuite il devint indifférent et, plus tard, ses bavardages de revenant le rendirent ridicule. Je sais bien les raisons de tactique dont il essaie d’excuser, d’expliquer et parfois de magnifier son éloignement. Les mêmes raisons ont-elles produit le moindre effet sur Picquart ? Ah ! celui qui n’a pas senti, à la première idée de départ, une répugnance invincible, un soulèvement de tout lui que nul raisonnement n’apaiserait, n’avait pas l’âme courageuse. Dès lors qu’il consentait à délibérer, il était perdu. Et pourtant, si bassement utilitaire qu’on soit, comment ne point comprendre, en de telles heures, qu’une attitude simple et sans défaillance importe mille fois plus que toutes les habiletés procédurières.

Le jour où tout semblait fini par l’acquittement d’Esterhazy, Zola fut celui dont la vaillance inattendue effare la marche brutale et tranquille des puissances. On eut raison d’applaudir son acte révolutionnaire. Mais le geste était supérieur à Zola, dépassait Zola, comme ce mot qu’il dit inattentif à la cour d’assises : « Je ne connais pas la loi. » Le prétendu révolutionnaire ferma les yeux, terrifié par la belle