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Je salue en deux sortes de poèmes une sincérité égale : dans les uns, le poète, ému de sa merveilleuse diversité, exprime avec fougue ou en souriant chacun de ses aspects, chacun de ses moments, se réjouissant surtout à ce qu’il y a d’extrême en lui. Dans les autres, conscient du centre de lui-même, il se dessine d’une ligne nette et simple. Malgré leur beauté de composition, c’est parmi les premières œuvres qu’on doit classer les Chansons Éternelles.

Les Chansons Éternelles forment une ligne parabolique dont les deux côtés vont se perdre dans l’infini. Paul Redonnel croit à la multiplicité des existences. Directement, il ne dit qu’un fragment d’une vie. Mais aux premiers pas quelques éclairs illuminent brusques les ombres antérieures, et bien des cris d’espoir ou d’effroi nous avertiront que le point d’arrêt de l’artiste n’est pas à l’homme un but final et que, pour lointain, l’horizon aperçu n’est qu’une limite illusoire.

Le livre se divise en trois parties que j’appellerais volontiers — les destinées sont des comètes — la sortie de l’ombre interstellaire, le passage dans la lumière, la rentrée dans l’ombre.