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I

Prostitués


On a mal dit : « L’homme n’est ni ange ni bête. » Il faut affirmer : L’homme est à la fois ange et bête. Ah ! le pauvre être double. Tout courbé sous les nécessités animales, tout soumis à son ventre, il sent sur sa lourdeur s’agiter des ailes nobles. Il est inquiet d’apprendre, inquiet de créer harmonieusement ; il aime le beau, il aime l’amour. Depuis des siècles de siècles, il fait la bête parce qu’il veut faire uniquement l’ange ; son poids le roule dans l’ordure parce qu’il oublie son poids et croit naïvement se libérer de la brute qui est une partie nécessaire de lui-même.

Les besoins physiques ne peuvent être satisfaits que par un travail physique. Nulle œuvre intellectuelle ne produira un grain de blé. Puis donc que j’ai besoin de manger comme