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consent à vivre sa vie comme un inéluctable cauchemar. Ce rêve noir, il le dit en des vers qui ne s’irritent jamais, qui sourient souvent, qui parfois s’amusent. D’autres jours, il se plaint d’une voix enfantine, ou se réfugie en quelque amour qu’il voudrait plus tendre que passionné, qu’il désirerait pensif, câlin et maternel.

Pourtant, ses plus pénétrants chefs-d’œuvre sont des chants de joie douce et de lumière attendrie :

Ni brume, ni soleil ! le soleil deviné,
Pressenti……

Il n’est pas de sourire plus charmant que la Bonne Chanson, Sagesse, Amour, Bonheur. La Bien-Aimée lui donna une heure de joie ; la Foi lui donna des heures de joie. Le bonheur le plus largement tranquille, c’est dans les murs étroits d’une prison qu’il le trouva. Il le dut surtout au calme du séjour qui dilatait son âme ; à la vie assurée et défendue contre les hostilités et les curiosités du dehors. Il se félicitait encore d’être protégé contre ses propres faiblesses de malheureux à qui il faut des joies quelles qu’elles soient ; contre les faiblesses de son cœur affamé qui cherchait