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l'initiative libre et intelligente par une précision servile et craintive. Elle a fait de l'ouvrier, jadis maître souriant des outils, l'esclave tremblant de la machine.

Comment la machine, qui multiplie les produits, ne diminue-t-elle pas la quantité de travail à fournir par l'homme ?

L'homme est avide et la folie des besoins imaginaires grandit à mesure qu'on la satisfait. Plus l'insensé a de choses superflues, plus il veut en avoir.

Le sage exerce-t-il une action sociale ?

Le sage remarque que, pour exercer une action sociale, il faut agir sur les foules, et qu'on n'agit point sur les foules par la raison, mais par les passions. Il ne se croit pas le droit de soulever les passions des hommes. L'action sociale lui apparaît comme une tyrannie, et il s'abstient d'y prendre part.

Le sage n'est-il pas égoïste d'oublier le bonheur du peuple ?

Le sage sait que ces mots : « le bonheur du peuple » n'ont aucun sens. Le bonheur est intérieur et individuel ; on ne peut le produire qu'en soi-même.

Le sage n'a donc pas pitié des opprimés ?

Le sage sait que l'opprimé qui se plaint aspire à devenir oppresseur. Il le soulage dans la mesure de ses moyens, mais il ne croit pas au salut par l'action commune.

Le sage ne croit donc pas aux réformes ?

Il remarque que les réformes changent les noms des choses, non les choses elles-mêmes. L'esclave est devenu le serf, puis le salarié. On n'a jamais réformé que le langage. Le sage reste indifférent à ces questions de philologie.

Le sage est-il révolutionnaire ?

L'expérience prouve au sage que les révolutions n'ont jamais de résultats durables. La raison lui dit que le mensonge ne se réfute pas par le mensonge et que la violence ne se détruit pas par la violence.

Qu'est-ce que le sage pense de l'anarchie ?

Le sage regarde l'anarchie comme une naïveté.

Pourquoi ?

L'anarchiste croit que le gouvernement est la limite de la